domingo, 23 de marzo de 2008

Donde La Tierra es Redonda.


Ce qui a le plus changé dans ma vie, c'est l'écoulement du temps, sa vitesse et même son orientation. Jadis chaque journée, chaque heure, chaque minute était née, inclinée en quelque sorte vers la journée, l’heure ou la minute suivante, et toutes ensemble étaient aspirées par le dessein du moment dont l’inexistance provisoire créait comme un vacuum. Ainsi le temps passait vite et inutilment, d’autant plus vite qu’il était plus utilment employé, et il laissait derrière lui un amas de monuments et de détritus qui s’appelait mon histoire. Peut-être cette chronique dans laquelle j’étais embarqué aurait-elle fini après des millenaires de péripéties par « boucler » et par revenir à son origine. Mais cette circularité du temps demeurait le secret des dieux, et ma courte vie était pour moi un segment rectiligne dont les deux bouts pointaient absurdement vers l’infini, de même que rien dans un jardin de quelques arpents ne rêvele la sphéricité de la terre. Pourtant certains indices nous enseignent qu’il y a des clefs pour l’éternité : l’almanach, par exemple, dont les saisons sont un éternel retour à l’echelle humaine, et même la modeste ronde des heures.
Michel Tournier
Foto: Enero 2008, Cabo Polonio.

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